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  • 20 octobre 2014

    Dolce Vita s'ouvre sur la première du film éponyme,palme de Cannes, produit par Giuseppe Peppino Amato. L'Italie semble en équilibre entre deux ères, deux règnes à l'aube des années 60. L'incipit installe l'ambiance de faux semblants, celle d'un pays sali par la dépravation, la veulerie où s'entremêlent superstition et crédulité. La scène rappelle l'ouverture du film La Grande Bellezza de Paolo Sorrentino (2013). Rome dans la splendeur de l'été. On suit les confidences de Don Emanuele Valfonda, quatorzième comte de Palmieri à Saverio, son confesseur jésuite.Le comte comme Jep Gamberdella jouit des mondanités de la ville.Il cache son désarroi sous une attitude cynique et désabusée mais son regard sur le pays est d'une troublante lucidité. L'Italie nouvelle, née de la faim et de la rage s'élance à la conquête de la vie et de l'art. Le lecteur découvre les chemins sinueux de ce "terrible et somptueux labyrinthe qui a pour nom Italie".Une atroce comédie où l'on apprend par le biais des confidences entre la vieille noblesse décadente et le prêtre jésuite l'émergence de la MAFIA, l'attentat de Milan en 1969, les Brigades rouges et l'existence de la loge P2. Loge maçonnique "couverte" c'est-à-dire secrète, créée dans le but de subvertir l'ordre politique, social et économique du pays dans un programme appelé le Plan de renaissance démocratique qui prévoit notamment le contrôle des médias à travers l'achat des organes de presse les plus importants.

    Simonetta Greggio associe au fil rouge des confidences des passages de non-fictions. La chronologie est parfois bousculée comme pour mieux mimer le chaos de l'Italie.

    Dolce Vita évoque dans l'excipit la mort du prince. Quatre années plus tard, Les Nouveaux monstres s'ouvre sur l'enterrement de Valfonda. Don Saverio est présent aux côtés d'Aria, journaliste et enfant des années de plomb. Véritable kaléïdoscope romanesque, Les Nouveaux monstres alterne reportages et secrets de famille pour mieux nous raconter le désenchantement d'un pays souillé par l'argent sale mais crédule aux propos d'un caïman.

    Tandis qu'on danse sur la Macarena, durant l'été 93, un peu à la manière de Jep Gamberdella, les différents scandales fonciers et le berlusconisme triomphent.

    Une fable noire qui met à nu les béances de cette Italie meurtrie.La lettre du juge Roberto Scarpinato, traduite par Anna Rizello dénonce à quel point l'Italie a basculé dans l'horreur.

    La fiction mêle l'intime et la dimension politique de manière très habile. Perversité et noirceur sont les maîtres mots mais la passion de Simonetta Greggio pour son pays qu'elle a quitté depuis trente ans offre au lecteur une vision richement documentée d'une faillite morale.

    Publication chez Stock, 2014, avec filmographie, notices biographiques et lexique de la MAFIA.


  • Conseillé par
    24 septembre 2014

    Voyage en Italie

    Après " La DolceVita "paru en 2010_, _Simonetta Greggio s’intéresse, dans  " Les nouveaux monstres ",à une époque bien plus sombre de l’Italie_. _A celle de  la corruption et de  la violence, des mensonges et des vices. A cette période qui débute en 1978 par la funeste mort d’Aldo Moro, et qui n’en finit plus.

    Aria et Santo appartiennent à la dynastie des Valfonda, cette famille italienne, jadis puissante, riche et influente. Aujourd’hui, à l’image de l’Italie, elle tombe en décrépitude et est « semée de saveurs perdues ».  Il ne reste plus aux Valfonda que des souvenirs de grandeur, à peine quelques restes de dignité. Aria est journaliste. La situation économique, sociale et morale de l’Italie contemporaine la révolte. Elle part à la recherche de ceux qui sont au centre de cette _mala Italia_, qui ont plongé son beau pays dans la violence et le désespoir. Elle cherche dans les archives des faits divers les dessous des règlements de compte de ces dernières années, et multiplie les rencontres qui pourraient lui être utiles. A côté de cette quête, une autre, plus intime. Celle de ses origines, des circonstances de la mort de son père, qu’elle n’a pas connu. Son oncle Saverio, prêtre homosexuel dont elle est très proche, l’aide dans ses recherches professionnelles et personnelles. Parallèlement à ces échanges qui datent de 2013, le lecteur est parfois projeté dans le passé, à la fin des années 1970, à l’époque où Viola, la mère d’Aria, rencontre Santo, le père de celle-ci. Leur histoire d’amour passionnée se déploie au milieu des jardins du château de Palmieri, propriété des Valfonda, sous le regard étrange et insaisissable de Saverio. Le bonheur du couple est finalement terrassé par la mort de Santo.

    Articles de presse signés Aria, lettres, mails, extraits de journaux intimes. Simonetta Greggio mélange les genres avec talent et dresse dans son livre un portrait de l’Italie contemporaine criant de vérité. Les magouilles de la mafia, l’immoralité des puissants, l’ignominie dont l’Eglise fait preuve, rien n’est laissé sous silence.

    Un livre fort et instructif sur la situation de l’Italie d’aujourd’hui, qui flirte avec l’essai historique mais réussit à garder son parfum romanesque.

    Lire la suite de la critique sur le site o n l a l u


  • Conseillé par (Libraire)
    21 août 2014

    Mafia Blues

    J'ai aimé ce roman qui dessine l'histoire politique de l'Italie depuis 1978. C'est la suite de "Dolce Vita 1959-1979" mais on peut ne pas l'avoir lu et directement commencer par celui-ci, sans se sentir perdu.

    Depuis qu'ils se sont rencontrés à l'enterrement du Prince de Valfonda, son demi-frère (et unique héritier), le jésuite don Saverio et sa petite-nièce Aria, journaliste d'investigation ne se quittent plus. Il lui raconte des secrets de famille et d'autres encore liés au Vatican. Elle lui envoie les papiers qu'elle écrit sur les liens troubles entre services secrets, mafia et partis politiques.

    Cette correspondance épistolaire nous éclaire sur les années de plomb, les attentats, les massacres, la corruption généralisée, la montée en puissance et l'arrivée au pouvoir de Berlusconi. Sa chute aussi. C'est passionnant, très instructif et puis, ça m'a donné envie de voir ou de (re)voir les films de Visconti et de visiter l'Italie (malgré tout).